19/09/2017
L’UICN (International Union for Conservation of Nature) a effectué une mise à jour de sa liste rouge cet été (ICI). Comme à chaque actualisation, de nouvelles espèces voient leur statut se dégrader.
Parmi les espèces concernées par ce déclassement figure plusieurs antilopes africaines dont L’éland de Derby ( Taurotragus derbianus ). Elle voit son statut passer de « Préoccupation mineure » (LC) à « Vulnérable » (V). Un triste sort pour l’antilope la plus impressionnante d’Afrique.
L’éland de Derby (Taurotragus derbianus) est la plus grande antilope d’Afrique. Son nom provient du mélange de trois mots : taureau (tauros), bouc (tragos) et enfin derby, de Edward Smith-Stanley, 13ème comte de Derby qui fit venir le premier couple d’éland en Angleterre en 1835.
- Il ne faut pas confondre l’éland de Derby avec l’éland du Cap . L’éland du Cap (ou éland commun) vit en Afrique Australe et de l’Est, ils seraient encore près de 100.000 et il est classé en « préoccupation mineure par l’UICN.
Un peu plus massif que l’éland du Cap, l’éland de Derby est appelé aussi éland « géant » surtout à cause de ses cornes beaucoup plus longues. Le record de trophée de chasse est de 123,8 cm, alors que le record pour l’éland commun dépasse à peine le mètre. L’éland de Derby est l’antilope la plus lourde d’Afrique, le poids des mâles pouvant atteindre 1 tonne !. Son pelage est gris beige, rayé verticalement de 12 fines rayures blanches (15 pour la sous espèce de l’ouest), lui conférant un parfait camouflage dans la brousse. Les mâles possèdent un fanon sous la gorge; Il est particulièrement grand en période de rut.
L’éland de Derby aime les zones de savane boisée. Son régime alimentaire est limité aux feuilles grasses de certaines espèces d’arbres en particulier l’Isoberlinia doka. C’est une antilope, intelligente, silencieuse, et très craintive, parcourant en petit troupeau de 10 à 30 individus une cinquantaine de kilomètres par jour. Malgré son poids, l’éland peut atteindre les 70km/h.
Son poids imposant, ses cornes majestueuses et son caractère farouche en ont fait l’un des trophées les plus recherchés par les chasseurs.(juste derrière le Big 5) Les chasseurs anglais le nomme « ghost » ou « Lord Eland », en raison de la difficulté de sa traque. Aux USA il existe des confréries dont le dernier grade est atteint par le fait d’abattre un éland de derby.
Selon l’UICN, sa population totale serait aujourd’hui comprise entre 12 000 et 14 000 individus, avec moins de 10 000 animaux matures. L’éland de derby a été exterminé en Côte d’Ivoire, mais aussi en Gambie, au Ghana, au Togo et il à probablement disparu d’Ouganda, du Nigeria et du Sud Soudan.
Il existe deux sous-espèces d’élands de Derby :
- L’éland de Derby de l’Ouest (Taurotragus derbianus derbianus), que l’on ne trouve aujourd’hui plus qu’au Sénégal (environ 250 individus) classé « en danger critique d’extinction » depuis 2008.
- l’Eland de Derby de l’Est (le Taurotragus derbianus gigas). Objet de cet article. On ne le trouve à présent qu’au Sud de la RCA , à l’Ouest du Tchad et au centre du Cameroun. Environ 12.000 individus.
La chasse n’est pas la raison principale de la chute de sa population et de sa disparition locale. Les causes de son déclin sont la peste bovine, le braconnage pour sa viande, l’empiétement sur les aires protégées et l’expansion des terres agricoles et pastorales. L’instabilité politique et les conflits armés en République Centrafricaine (RCA), qui abritait auparavant la plus grande population de l’espèce, sont des obstacles importants à sa protection, si bien que c’est maintenant le Cameroun qui se trouve être le principal bastion de l’espèce.
J’ai eu l’occasion de croiser l’éland de Derby au Cameroun justement, dans le parc National de Boubandjida en 2014. C’est une antilope très impressionnante, qui rappelle par sa masse un gros buffle Caffer. Elle est très difficile à observer, très farouche, j’ai dû circuler dans le parc pendant 4 jours pour pouvoir l’observer quelques minutes à peine, mes photos sont donc très décevantes. Lors de ce séjour, je me suis aussi perdu dans le Nord Cameroun, et j’ai été recueilli par des chasseurs qui m’ont donné l’opportunité de goutter sa viande lors d’un repas…elle est absolument délicieuse. (désolé…)
De rares projets d’études et de protections sont menées par l’ONG Derbianus Conservation dans la réserve de Chinko en RCA et dans les parcs de Niokolo Koba et Bandia au Sénégal. Pour sa sauvegarde l’éland de Derby ne peut hélas que compter sur sa nature farouche.
4 autres espèces d’antilopes voient leurs statuts abaissés :
Le cobs des montagnes (Redunca fulvorufula), précédemment classé aussi en « Préoccupation mineure » (LC), Il a subi un déclin de près de 55% dans sa population en Afrique du Sud au cours des 15 dernières années. Il est à présent classé « En danger » (EN). Les principales causes de son déclin sont la réduction de son territoire et le braconnage. (voir mon article sur les cobs)
La gazelle d’Erythrée (Eudorcas tilonura), qui est maintenant En danger (EN) en raison de la dégradation de ses habitats et de la compétition avec l’élevage.
Le cobe Lechwe (Kobus leche), classé à présent en « Quasi menacé ». En cause, la sécheresse, le braconnage, et l’emprise agricole et pastorale.(voir mon article sur les cobs)
Le pelea ou Rehbuk, (Pelea capreolus), cette antilope d’Afrique du Sud passe à la catégorie « Quasi menacé » (NT). Les raisons de ce déclin sont mal connues.
BUD PUMBA
Plus d’information :
Actualités de la Faune Sauvage Africaine (AFSA) 
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